Mardi 3 mai 2016

Toujours le même temps fripé, broussailleux, le printemps ne parvient pas à sortir la tête des nuages et le ciel fait la gueule avec, en plus, par moments quelques minauderies de puis même si, peu à peu, lentement, comme à regrets, vers seize heures, sous les chatouilles du vent, il commence à se dérider laissant espérer que, demain, il pourrait faire beau. Mais en ce domaine il ne faut jamais prendre ses désirs pour des réalités.

En cette fin de séjour, je n’ai plus grand motif de visite car je commence à me détacher de Vienne. J’opte donc pour un lieu où je ne suis pas encore allé mais qui, a priori, ne me tente pas, la cité des affaires qui se tien dans une île entre deux branches du Danube. Quant à marcher pour marcher, marcher n(‘importe où me convient car aussi loin que je remonte dans mes souvenirs, je crois avoir toujours su que la solitude, que la marche solitaire surtout, était la condition qui m’était indispensable pour une imagination libre dans ces moments de latence où le cerveau, activé par la marche, presque sans contrôle, tourne comme une machine autonome croisant, brassant, configurant et reconfigurant des pensées fragmentées, en faisant et défaisant les nœuds pour des résultats improbables. Il y a quelque chose comme une méditation active dans ces moments là et c’est ainsi que je crois avoir toujours réussi à résoudre certaines difficultés intellectuelles, à inventer des solutions nouvelles et à initier de nouveaux projets de création.

Je n’y suis donc allé que pour marcher. heureusement car le lieu, mis à part qu’il y a trois ou quatre gratte-ciels est sans intérêt. Mais j’ai quand même eu une divine surpris quand arrivé au bout de cette fausse Défense, je suis arrivé au Donaupark, le parc du Danube : un magnifique parc, très grand, très vert, parfaitement entretenu par ces chômeurs qui, pour compléter leurs maigres pensions, acceptent d’y travailler pour un euro l’heure, un rêve pour la France libérale qui aimerait bien instaurer cela aussi. Il y a dans ce parc un petit train qui en fait le tour et qui part, quand il fonctionne, de la station de métro Alte Donau. J’ai préféré bien sûr le faire à pied, c’est un mélange de pelouses, de bosquets, de parterres fleuris, d’étangs qui composent un superbe paysage très reposant d’autant qu’en ce jour de semaine où la météo n’était pas bonne, il n’y avait pratiquement personne. J’ai délaissé la tour de la télévision, seul lieu où se trouvaient quelques touristes désireux de voir le panorama sur la ville et le fleuve et, continuant ma marche, je suis arrivé sur les bords d’un des bras du Danube qui a été aménagé en plages, une plutôt petite, gratuite ; une autre très grande et payant quoique publique. Il faut dire que, autant que j’ai pu en juger, elle est très bien aménagée avec des jeux pour enfants, diverses piscines, des cabines et, me semble-t-il, même quelques petites maisons que l’on peut louer. En été, ce doit être un lieu très fréquenté par les familles. J’ai donc presque fait le tour de l’île, deux bonnes heures de marche mais autant la rive Nord en est bien aménagée, la rive Sud n’est guère rien d’autre qu’une autoroute dont le bruit, d’ailleurs, et c’est le seul point noir, pollue même le silence du parc.

Ce n’est pas la première fois que je remarque, dans les villes où je vis quelques jours qu’existent partout des lieux comme celui-ci qui ne sont pas conçus pour les touristes et présentent pourtant beaucoup de charme. Je suis de plus en plus persuadé que pour avoir de vrais surprises, il faut ne pas hésiter à sortir des circuits promus par les tour operators.

Une île sur le Danube

Partager cet article